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Jusqu'au bout à Villa O'Higgins

Le 28 février 2018

Les petites infos en +:

Bus Caleta Tortel - Villa O’Higgins: 4.000P à réserver à l’avance en haute saison.
Traversée du Lac O’Higgins: 36.000P ou 38.000P avec le transfert au port (7km de marche).
Côté argentin, après les 22km de marche, traversée du Lac del Desierto: 700ARS.

La journée se termine ce samedi 27 janvier quand nous arrivons à Villa O’Higgins, cette ville du bout du monde d’où il faut prendre un bateau et marcher plus de 20km pour atteindre l’Argentine. C’est ce qu’on a choisi de faire, on ne le sait pas encore mais on n’est pas au bout de nos peines.
En débarquant du bus, la première chose que nous voulons faire est réserver notre place dans le fameux bateau qui doit nous faire traverser le lac appelé O’Higgins côté chilien ou San Martin côté argentin. On nous indique une maison à quelques dizaines de mètres. Je pars en reconnaissance et je débarque chez une famille, comment dire… bien d’ici! Et là, c’est un peu la douche froide, il n’y a pas de bateau demain, la météo est trop mauvaise. Et lundi? On ne sait pas encore, c’est l’armée ou plutôt la marine qui décide si le port peut ouvrir ou non. Ok, bon ben on va peut-être devoir rester plus longtemps que prévu dans ce coin.
On décide de s’inscrire sur la liste des passagers et on découvre qu’on n’est pas les seuls à attendre le départ… nous sommes bons vingtièmes sur la liste d’attente, en sachant que le bateau ne compte que 14 places, on ne partira pas avec la première embarcation. De là, nous décidons d’aller prendre des renseignements auprès de la deuxième « agence » qui propose le trajet.

L'accueil est on ne peut plus froid: pas de départ avant le 2 février, soit 6 jours d’attente. Très bien monsieur, peut-on s’inscrire sur une liste d’attente? Une fois de plus on se retrouve à la suite d’un bon nombre de gens et là, ce serait pour le troisième départ. Si, comme nous a dit la première compagnie, ça s’améliore en début de semaine, on ne devrait pas trop perdre de temps. On en saura un peu plus demain soir, après 18h, quand la marine militaire aura pris sa décision. D’ici là, il nous faut trouver un endroit où dormir. Le camping recommandé par les Français de Tortel nous semble bien sympathique, mais en arrivant, la gérante nous annonce qu’il est plein. Demain, il y a des départs, on pourra revenir. Nous tentons alors notre chance dans un autre, situé juste en face, et ouf on peut s’installer. Le temps de cuisiner vite fait quelques chose et de profiter de la chaleur de la pièce commune, nous partons nous coucher.

L'animation à son comble dans les rues de Villa O'Higgins

Au réveil ce dimanche matin, il pleut… on ne peut pas dire que ça nous donne envie de démarrer cette journée. Heureusement, le mauvais temps s’éloigne un peu et nous partons faire quelques courses dans la ville. A notre retour au camping, on constate que l’hygiène n’est pas vraiment le point fort de la propriétaire, on ne voulait pas le voir la veille, mais ça laisse vraiment à désirer. Après notre repas express, nous décidons, avec Daniel, notre compagnon allemand, de changer de camping. Un coup d’oeil dans la pièce commune finit de nous convaincre qu’il faut déplacer nos tentes! C’est ce que nous faisons et même si on met du temps à trouver un endroit (un peu) à l’abri du vent à El Mosco, on prend vite nos marques

dans ce camping où on se sent comme à la maison. Dans l’après-midi, vu que le soleil fait son grand retour, nous décidons de marcher jusqu’au port, d’où notre bateau doit partir. C’est à cet endroit que se termine réellement la Carretera, après 1247km depuis Puerto Montt. Une balade de 7km qui offre quelques beaux points de vue notamment sur deux glaciers et sur le lac O’Higgins. Au bout, il est là, le fameux panneau qui nous signale que ça y est, nous sommes au bout du bout.

De retour dans le village, la soirée a commencé… il est temps d’aller aux nouvelles auprès de la compagnie de bateau. Verdict: rien pour demain et les prochains jours sont encore incertains, RDV demain même heure pour en savoir plus.
Le temps de faire quelques courses, on se retrouve dans la salle commune du camping avec beaucoup de Français venus d’un peu partout: il y a Laurent le Breton croisé à Coyhaique, Martine & Robert les voisins Tarnais, Marie-Hélène la Grenobloise et Joël le Parisien, entre autres. Une première soirée bien sympathique et bizarrement, on sent que ce ne sera pas la dernière…

Lundi, le temps n’est vraiment pas à la fête, et on se dit qu’on a de la chance d’être dans ce camping, El Mosco, où la propreté et la chaleur nous font du bien. On profite de ce confort pour travailler sur le site, une journée faite aussi de pas mal de discussions avec nos compagnons d’infortune… Bref, les heures s’écoulent doucement jusqu’à l’activité journalière qui consiste à aller prendre des nouvelles de ce fameux bateau… toujours rien demain!
On commence à réfléchir à une autre solution pour passer en Argentine, mais d’où nous sommes, ce ne sont pas moins de quatre jours de trajet qui nous attendent pour rejoindre notre objectif… on décide donc de voir ce qu’il se passe d’ici la fin de semaine et là nous prendrons une décision. Comme la veille, la soirée se passe dans la convivialité et la chaleur de cet endroit si particulier.


Mardi matin après une nouvelle séance de travail, nous décidons de partir prendre l’air. Le beau temps est au rendez-vous. D’ailleurs, parenthèse, mais on ne comprend pas cette histoire de bateau qui ne part pas à cause du vent. Ici c’est plutôt calme mais d’après eux plus loin sur le lac c’est déchainé, on a du mal à les croire. Mais on est bien obligé de faire avec, donc aujourd’hui ce sera rando. Nous partons sur un chemin qui débute dans les bois. Mais après une petite heure, le paysage se dévoile: une vue imprenable sur la vallée mais aussi sur les glaciers qui l’entourent. Plus on grimpe, plus c’est beau… finalement, on est contents d’être bloqués ici, on n’aurait jamais admirer ces panoramas.

De retour à Villa O’Higgins, alors qu’on profite de la chaleur du camping, quelqu’un déboule: un bateau part demain! Là, c’est l’excitation générale. Même si nous savons que nous ne sommes pas sur le premier départ, certaines personnes ont peut-être abandonné en cours de route ce qui pourrait nous faire remonter sur la liste d’attente. En arrivant devant chez la Florentina (c’est le nom de la charmante dame qui conduit l’embarcation), nous ne sommes pas les seuls. Mais pas de surprise, nous ne partons pas sur ce bateau, a priori toutes les personnes de la liste sont encore dans les parages, d’ailleurs nos Tarnais Martine & Robert seront du voyage demain matin (à 6h, ça pique et avec 7km à parcourir à pied ou en vélo pour rejoindre l’embarcadère). Si le temps se maintient, il pourrait y avoir un deuxième voyage vers 13h et là… nous sommes sur la liste! Il faudra venir aux nouvelles demain matin, encore. Mais franchement, on n’y croit pas vraiment. Nous décidons de partir à la pêche aux infos auprès de l’autre agence où nous sommes inscrits et là, on nous annonce que le port est fermé. A force d’insister, on a l’explication: lui ne peut pas partir car son embarcation est plus petite et le vent restera trop fort pour son bateau. Au camping ce soir, les discussions vont bon train et chacun y va de sa théorie, mais on commence à tomber d’accord: ça sent un peu la magouille leur histoire de port fermé.

Vue imprenable sur les glaciers Mosco et Huemul

 

Mercredi 31 décembre, quatrième réveil à Villa O’Higgins et on découvre que le premier bateau est bien parti ce matin. On se dit que ce serait bien si ce petit séjour pouvait se terminer aujourd’hui, même si franchement, on n’a pas envie de quitter ce petit paradis de camping.

Nous sommes donc dans l’attente du verdict. Á 9h, nous partons aux nouvelles, mais elles ne sont pas encore arrivées… 10h, 11h… et enfin: on ne partira pas! Aucun espoir pour demain, ce ne sera pas avant vendredi. Au moins, nous voilà prévenus.Après ce début de journée sous tension, nous reprenons nos activités… c’est à dire pas grand-chose. Travail sur le site, discussions, café, thé et un peu de cuisine, enfin ça c’est surtout la partie de Daniel qui s’est mis à nous concocter un ragoût. Il est cuisinier donc il est ravi de s’y coller et quand l’heure du repas est arrivée, on doit dire qu’il a eu raison de faire ce métier: c’est un délice!

De gauche à droite, on vous présente: Daniel, Joël, Laurent et Marie-Hélène

Aujourd’hui, nous décidons de nous balader autour de la ville, et de grimper sur les miradors qui la surplombent. Matthieu part faire un premier repérage avec Laurent le Breton et puis il repart avec moi un peu plus tard. Ce n’est pas la balade de l’année, mais on se rend compte de la taille de ce village du bout du monde où les gens sont (grassement) payés par le gouvernement pour y rester et en fait on comprend… il n’y a vraiment rien. Jusqu’aux années 90 et la construction de la Carretera Austral, le coin était complètement isolé, uniquement ravitaillé par les bateaux qui circulaient sur le lac… difficile à imaginer aujourd’hui, alors qu’un aérodrome a même été construit. Nous passons aussi quelques minutes au « musée » du village et puis on travaille et mine de rien, le retard se remonte petit à petit.

En milieu d’après-midi, nouveau retournement de situation: Fili, la gérante du camping, nous annonce qu’elle vient de recevoir la liste des passagers du lendemain matin avec la Florentina et… nous sommes dessus! Il faudra y passer vers 18h pour payer et demain, direction l’Argentine!On attend avec impatience le moment de partir et enfin nous nous présentons… l’information a circulé et nous ne sommes pas les seuls à attendre des infos devant la porte. Après une bonne heure d’attente, enfin quelqu’un sort et nous annonce que… le port est fermé! Quoi? Mais il y a à peine deux heures, nous devions partir et là plus rien! On n’y comprend vraiment rien.Nous décidons d’aller aux nouvelles à l’autre agence et là, très calmement, le patron nous annonce qu’il part bien le lendemain matin. Il appelle même devant nous les marins qui confirment que le port est bien ouvert. C’est à n’y rien comprendre leurs histoires. Le problème c’est que dans cette deuxième agence, chez Marcus, nous ne sommes pas sur le bateau de demain matin mais sur le prochain , prévu l’après-

midi, normalement! D’ailleurs quand je pose la question de savoir si le bateau partira, ce cher Marcus me répond par un sourire, impossible de lui arracher la moindre info. On sent quand même qu’il est un peu plus carré que notre mamie de l’autre bout de la ville, et puis on n’a pas envie que d’autres prennent nos places, donc on décide malgré l’incertitude de payer et nous verrons bien si nous partons demain.Matthieu et Daniel, eux, sont ravis de ne pas avoir à se lever… c’est une nouvelle bonne soirée qui s’annonce au camping. Une soirée qui sera pleine de rebondissements: au bout de la réflexion, un frère et une soeur Canadiens craquent… étant trop loin dans les listes et pris par le temps, ils décident de prendre l’avion pour passer de l’autre côté! Une addition salée mais qui les fera survoler les glaciers. Ils embarquent avec eux María Ines, une Argentine, et Amy, une de leurs compatriotes.

 

Vendredi matin, on constate que le premier bateau est bel et bien parti, ce sera peut-être notre tour dans les prochaines heures. Mais avant de tout ranger, nous préférons attendre la confirmation. A notre arrivée au bureau, à la mi-journée, c’est la femme de Marcus qui nous reçoit… elle appelle son mari une fois, pas de réponse, deux fois, trois fois… et enfin il répond. Vue sa tête, on comprend que ça ne sent pas bon pour nous et effectivement on ne partira pas cet après-midi mais c’est sûr rendez-vous demain matin à 5h30 à l’agence! On commence quand même à y croire.

De retour au camping, la gentille Fili est surprise de la nouvelle et est presque désolée de nous faire payer une nuit supplémentaire. Mais finalement on est ravis de passer une dernière journée ici surtout qu’il est censé y avoir une petite fête dans le village. Nous y allons en fin d’après-midi, avec Daniel, Laurent, Martin un tchèque qui travaille au camping, ainsi que Franzisca, une Suisse et Sandrine & Paul les Français.  Mais c’est comment dire, assez… calme! En fait, les gens se retrouvent dans un champ et s’assoient à des tables pour discuter et manger les petites douceurs bien grasses vendues sur place. Une ambiance assez particulière qui ne nous verra pas rester très longtemps, on préfère celle del Mosco.  

Cette dernière soirée à Villa O’Higgins nous donne presque le cafard, on sent que le départ est de plus en plus sûr. Malheureusement, il faut bien avancer mais ça nous fait tout drôle de savoir qu’on va quitter cet endroit où on se sentait comme à la maison.

Avec Fili & Martin del Mosco

Et ce qui devait arriver arriva: réveil à 4h30… en rangeant la tente, on espère tous ne pas avoir à la remonter dans quelques heures au même endroit. Nous arrivons à l’agence, et là notre charmant Marcus ne nous décroche pas un mot mais charge nos sacs… c’est bel et bien le départ. Arrivés au port, nous découvrons notre embarcation et là, on comprend pourquoi il ne peut pas partir s’il y a trop de vent, on se demande d’ailleurs si on ne va pas couler.
Mais le moteur démarre, Marcus prend la barre, c’est parti pour trois heures de navigation… Rendez-vous de l’autre côté du Lac O’Higgins pour un passage de frontière qui s’annonce dores et déjà épique, avec ses 22km de marche! 

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